Goma, RDC : Crise humanitaire, tensions politiques et conflit régional avec le Rwanda – Le rôle des acteurs politiques et de la société civile
La ville de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), est au cœur d’une crise humanitaire, sanitaire et politique d’une ampleur alarmante. Alors que les tensions entre la RDC et le Rwanda atteignent un niveau critique, les acteurs politiques locaux, régionaux et internationaux, ainsi que les organisations de la société civile, tentent de répondre à cette situation complexe. Cependant, leurs interventions peinent à enrayer une crise qui continue de s’aggraver.
Contexte politique et militaire : tensions régionales et interventions internationales
Les tensions entre la RDC et le Rwanda dominent l’actualité politique à Goma. Le gouvernement congolais, dirigé par le président Félix Tshisekedi, accuse Kigali de soutenir le groupe rebelle du M23 (Mouvement du 23 mars), responsable de violentes attaques dans le Nord-Kivu. Ces accusations sont corroborées par des rapports des Nations unies, qui décrivent un Rwanda impliqué dans le financement, l’armement et même le déploiement de troupes pour appuyer le M23 [1].
En réponse, le gouvernement congolais a intensifié ses efforts militaires, avec le soutien de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO) et des contingents régionaux de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC). Cependant, ces interventions n’ont pas encore permis de rétablir la stabilité. Au contraire, les combats entre l’armée congolaise, le M23 et d’autres groupes armés ont provoqué des déplacements massifs de population, exacerbant la crise humanitaire [2].
La communauté internationale, notamment les Nations unies et l’Union africaine, a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à un dialogue inclusif. Des efforts de médiation ont été lancés sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est, mais les pourparlers restent bloqués en raison des divergences profondes entre la RDC et le Rwanda. Le président Tshisekedi a récemment déclaré que « la paix ne sera possible que si le Rwanda cesse son agression », reflétant une rhétorique de plus en plus belliqueuse [3].
Crise humanitaire : interventions des organisations locales et internationales
La crise humanitaire à Goma a mobilisé une multitude d’acteurs, tant locaux qu’internationaux. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et le Programme alimentaire mondial (PAM) sont en première ligne pour fournir une aide d’urgence aux déplacés. Cependant, ces organisations font face à des défis majeurs, notamment un manque de financements et des difficultés d’accès en raison de l’insécurité [4].
Les organisations locales, telles que la Caritas Goma et le Réseau des organisations humanitaires du Nord-Kivu (ROHNU), jouent un rôle crucial dans la réponse à la crise. Elles fournissent des abris, de la nourriture et des soins de santé aux déplacés, tout en plaidant pour une plus grande attention internationale sur la situation à Goma. Cependant, leurs ressources sont limitées, et elles peinent à répondre à l’ampleur des besoins [5].
La société civile congolaise, notamment les groupes de défense des droits de l’homme, a également dénoncé les violations massives des droits humains commises par les groupes armés et les forces de sécurité. Des organisations comme la Voix des sans-voix (VSV) et le Centre d’études pour la paix, la démocratie et les droits de l’homme (CEPADHO) documentent les exactions et plaident pour une justice transitionnelle [6].
Crise sanitaire : efforts des acteurs de santé et défis persistants
La crise sanitaire à Goma a mobilisé des acteurs nationaux et internationaux, mais les défis restent immenses. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et Médecins sans frontières (MSF) sont activement impliqués dans la lutte contre les épidémies de choléra et de rougeole, ainsi que dans la réponse à la pandémie de COVID-19. Cependant, les infrastructures de santé locales sont débordées, et les ressources manquent pour faire face à l’afflux de patients [7].
Le gouvernement congolais, par le biais du ministère de la Santé, a lancé des campagnes de vaccination et de sensibilisation, mais leur impact est limité par l’insécurité et la méfiance de la population. Les organisations locales, comme l’Association des femmes pour la promotion et le développement endogène (AFPDE), jouent un rôle clé en sensibilisant les communautés aux pratiques d’hygiène et en facilitant l’accès aux soins de santé [8].
Inégalités sociales : plaidoyer et actions de la société civile
La crise actuelle exacerbe les inégalités sociales à Goma, et la société civile se mobilise pour défendre les droits des populations les plus vulnérables. Des organisations comme le Groupe d’étude sur le Congo (GEC) et le Réseau des femmes pour la défense des droits et la paix (RFDP) documentent les impacts de la crise sur les femmes, les enfants et les personnes déplacées, et plaident pour des politiques publiques plus inclusives [9].
Les femmes, en particulier, sont au cœur des actions de la société civile. Des initiatives locales, comme celles portées par le Collectif des associations féminines pour le développement (CAFED), visent à autonomiser les femmes déplacées en leur offrant des formations professionnelles et un accès à des microcrédits. Cependant, ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur des besoins [10].
Perspectives et recommandations
Pour répondre à la crise à Goma, une approche coordonnée et multidimensionnelle est nécessaire. Voici quelques recommandations clés :
- Renforcer la médiation régionale: La communauté internationale doit soutenir les efforts de médiation entre la RDC et le Rwanda, en impliquant tous les acteurs régionaux pour parvenir à une solution pacifique [11].
- Augmenter l’aide humanitaire: Les donateurs internationaux doivent augmenter leurs contributions pour répondre aux besoins urgents des déplacés et renforcer les capacités des organisations locales [12].
- Soutenir les systèmes de santé: Des investissements sont nécessaires pour renforcer les infrastructures de santé et améliorer l’accès aux soins pour les populations vulnérables [13].
- Promouvoir la justice et les droits humains: Les violations des droits humains doivent être documentées et les responsables tenus pour responsables, avec le soutien de la Cour pénale internationale (CPI) si nécessaire [14].
- Impliquer la société civile: Les organisations locales doivent être intégrées dans les processus de prise de décision pour garantir que les réponses à la crise soient adaptées aux besoins des communautés affectées [15].
En conclusion, la crise à Goma est un rappel brutal des conséquences dévastatrices des conflits armés et des inégalités sociales. Alors que les acteurs politiques et de la société civile se mobilisent, une réponse internationale plus forte et plus coordonnée est essentielle pour apporter une solution durable et protéger les populations civiles.