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Brice Clotaire Oligui Nguema et les jeunes Gabonais : des promesses, mais quelle vision ?

En pleine campagne présidentielle, Brice Clotaire Oligui Nguema, candidat sous la bannière du Mouvement patriotique d’action pour un Gabon meilleur, multiplie les déclarations choc et les promesses. À Port-Gentil, devant de nombreux jeunes, il a déroulé un discours séduisant, mais parfois contradictoire. D’un côté, il encourage les jeunes à se lancer dans des secteurs porteurs comme l’agriculture, la pêche et les transports, tout en garantissant une exonération fiscale de trois ans.
De l’autre, il propose une mesure immédiate : nettoyer la ville en échange de 150 000 FCFA par mois pendant trois mois. Puis, dans un revirement inattendu, il assène : « Vous voulez tout cadeau, mais l’État providence n’existe plus. » Comment peut-on promettre de distribuer des ressources et, dans le même souffle, affirmer que l’État ne peut plus tout donner ? Cette contradiction illustre une approche improvisée de la question de l’emploi et soulève un enjeu majeur : le Gabon a-t-il une véritable stratégie pour offrir un avenir solide à sa jeunesse ?

Des promesses électorales aux réalités économiques

Les propositions d’Oligui Nguema s’inscrivent dans une logique séduisante :
• Encourager l’entrepreneuriat (agriculture, pêche, élevage de poulet)
• Créer des emplois temporaires (nettoyage de la ville rémunéré à 150 000 FCFA/mois)
• Ouvrir des postes budgétaires dans l’éducation
Mais au-delà des mots, plusieurs questions se posent :
• Les jeunes ont-ils un réel accès au financement ? Un projet de 2 millions de FCFA pour élever des poulets semble réalisable, mais sans accompagnement financier et logistique, comment garantir sa viabilité ?
• Quels débouchés pour ces secteurs ? L’agriculture et la pêche sont des axes stratégiques, mais sans infrastructures solides, sans transformation locale et sans accès facilité aux marchés, ces filières risquent de ne pas absorber la demande d’emploi.
• Emploi temporaire = solution durable ? Promettre un emploi sur trois mois, c’est injecter de l’argent dans l’économie à court terme, mais que deviennent ces jeunes après ?

Le problème est là : des mesures ponctuelles sans vision structurée ne suffisent pas.

Un véritable plan d’action pour l’emploi : que faut-il faire ?

Si Oligui Nguema veut vraiment marquer l’histoire et sortir du piège des promesses populistes, il doit transformer son discours en une feuille de route concrète, avec des engagements précis.

  1. Créer un véritable fonds d’investissement pour la jeunesse

Plutôt que de suggérer aux jeunes de « se débrouiller » avec de petits budgets, l’État doit créer un fonds national dédié au financement des projets innovants, avec un accompagnement sur trois à cinq ans, un suivi rigoureux et un accès simplifié aux crédits.

  1. Structurer l’agriculture et la pêche en véritables filières d’avenir

Lancer des jeunes dans ces secteurs est pertinent, mais sans modernisation des infrastructures, facilitation de l’exportation et valorisation de la transformation locale, ces initiatives resteront précaires. Créer des zones agricoles industrielles avec des coopératives soutenues par l’État serait une solution plus durable.

  1. Miser sur la formation et l’innovation
    L’employabilité passe par des formations adaptées aux réalités économiques. Pourquoi ne pas créer un grand programme de formation accélérée dans les métiers d’avenir : numérique, énergies renouvelables, logistique, maintenance industrielle ? L’exemple du Rwanda, qui a misé sur la tech et les start-ups, montre que c’est possible.
  2. Instaurer un contrat État-Jeunesse

Au lieu de lancer des promesses vagues, l’État pourrait proposer un véritable pacte avec la jeunesse : un programme structuré où chaque jeune bénéficie soit d’une formation qualifiante, soit d’un emploi dans un secteur prioritaire, en échange d’un engagement à contribuer activement au développement national.

Le Gabon doit sortir du « déjà vu »

Les jeunes gabonais sont fatigués des discours de campagne sans lendemain. Le développement d’un pays ne repose pas sur des promesses temporaires, mais sur une politique volontariste et cohérente. Si Brice Oligui Nguema veut réellement convaincre et transformer le Gabon, il doit abandonner les formules électoralistes et proposer un modèle économique audacieux et inclusif. Le scrutin du 12 avril 2024 ne doit pas être un simple rendez-vous électoral. Il doit être l’opportunité de redéfinir l’avenir du Gabon, avec une jeunesse qui ne croit plus aux illusions, mais qui veut des engagements concrets et une véritable vision du futur.

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